Parmi les pouvoirs supplémentaires qu’obtiendrait un Québec indépendant, ceux concernant l’environnement mèneront à une gestion bien différente de celle qu’opère le Canada. L’environnement, étant étroitement lié à la gestion du territoire, nous ne pourrons avoir le plein contrôle de celui-ci tant que nous demeurerons dans le régime canadien. L’indépendance nous permettra ainsi de gérer les questions environnementales selon nos priorités, plutôt que de nous en remettre à celles d’un gouvernement élu en majorité par un autre peuple.
Voici les pouvoirs sous l’égide exclusive du gouvernement du Canada qui ont des répercussions sur l’environnement, avec des exemples de décisions canadiennes que l’exercice de ces pouvoirs a rendues possibles. Cela montrera la liberté d’action que gagnera un Québec indépendant dans ce domaine.
Les pouvoirs qui nous échappent :
Les traités internationaux
-La ratification des traités internationaux est actuellement une compétence du gouvernement fédéral.
-Le Québec n’a donc aucun poids diplomatique à l’étranger et ne peut pas signer ses propres accords et traités.
-Comme le protocole de Kyoto, par exemple, dont le Canada fut le seul pays à se retirer alors que le Québec s’y montrait favorable.
-En tant que pays, le Québec siégera au sein des instances internationales et pourra ainsi défendre ses intérêts et ses convictions environnementales.
-Bien sûr, le Québec n’exercera pas une influence aussi grande que celle des États-Unis, mais elle serait plutôt initialement comparable à celle des pays scandinaves.
-Le Canada est un État pétrolier et est le meneur mondial en subventions publiques des pétrolières.
-Le Québec et le Canada n’ont pas les mêmes priorités et valeurs environnementales.
Oléoducs et gazoducs
-Le gouvernement fédéral est responsable de tous les projets impliquant plus d’une province et peut contourner les décisions et les conditions des gouvernements provinciaux.
-Comme en 2014, lorsque le gouvernement du Québec n’a pas eu un mot à dire quand l’Office national de l’énergie a accordé la permission à Enbridge de procéder à l’inversion de l’oléoduc 9B.
-Le Québec n’est pas maître de son territoire.
La gestion de l’eau
-La gestion de l’eau du Québec est également une compétence du gouvernement fédéral.
-Le Québec n’a donc pas son mot à dire sur la gestion des plans d’eaux comme le fleuve et le golfe du Saint-Laurent, la baie James, la baie de Hudson, la baie d’Ungava et tous les 3.6 millions de lacs, rivières, étangs et mares sur son territoire.
-La gestion de l’eau est une compétence qui englobe les pouvoirs du transport maritime, les pêches, le statut des espèces protégées, la navigation, les terres fédérales et les relations avec la Commission mixte internationale (partage des plans d’eau avec les États-Unis).
-Plus de 20 ministères et organismes du gouvernement canadien ont des responsabilités dans la gestion de l’eau, ce qui fait beaucoup de différents joueurs extérieurs intervenant dans les ressources du Québec.
-La recherche faite dans nos eaux est ainsi financée et dirigée à partir d’Ottawa, ce qui l’oriente vers les intérêts du gouvernement du Canada.
-Comme à l’institut Maurice-Lamontagne à Rimouski qui s’est fait couper unilatéralement son financement en 2012.
-Si le gouvernement canadien ne protège pas les milieux marins québécois, il en est de notre devoir.
Le transport
-Les normes de transport sont aussi régies par le gouvernement canadien. Ces normes encadrent, entre autres, les émissions de GES et la sécurité environnementale.
-Cette gestion de transports Canada s’est notamment démarquée lors d’un relâchement de la surveillance du transport par train, qu’a eu lieu à Lac-Mégantic et qui a coûté la vie de 47 personnes.
Le financement de la recherche
-Tel que précédemment mentionné, le financement de la recherche des milieux marins relève du gouvernement fédéral. Celui-ci divise donc son financement et ses bourses aux instituts et universités québécois en fonction de ses priorités.
-Son mandat est de financer les « recherches qui bénéficieront aux consommateurs et à ses partenaires industriels et gouvernementaux ».
-Comme en 2010 lorsque la Fondation canadienne pour les sciences du climat et de l’atmosphère a vu son financement réduit, ce qui a mis fin à ce réseau unique de chercheurs.
-Ce financement vient en partie de la perception des taxes et des impôts des contribuables québécois. Indépendant, le Québec récupérerait l’argent qu’il envoie à Ottawa et pourrait l’investir, à sa juste guise, dans la protection de son territoire.
L’écofiscalité
-L’écofiscalité peut être définie comme un ensemble d’instruments économiques visant à réduire les atteintes à l’environnement.
-Puisque le Québec n’est pas maître de tous les impôts, des taxes et des règlements sur son territoire, celui-ci est limité par rapport aux mesures d’écofiscalité qu’il peut mettre en œuvre.
-Au Canada, toute initiative d’écofiscalité nécessite une concertation avec toutes les provinces.
-En tant que pays, le Québec pourrait se doter d’une écofiscalité complète et pragmatique, avec tous les pouvoirs fiscaux d’un État, sans devoir attendre le Canada.
Autres contraintes
-Les normes d’émissions des polluants atmosphériques et la gestion des matières dangereuses (comme les déchets nucléaires) sont aussi de compétence fédérale.
-L’agriculture et la santé, aspects indissociables de l’environnement, sont également des compétences dont le gouvernement canadien détient un pouvoir de contrainte, qu’il exerce en limitant ou en donnant des conditions aux fonds alloués au Québec.
Conclusion
-Plusieurs fois le gouvernement du Canada a montré que ses choix ne cadrent pas avec ceux qu’auraient fait le gouvernement du Québec, une institution pourtant démocratique.
-L’environnement est de plus en plus important pour notre société, et l’indépendance ouvrirait les voies démocratiques pour se doter de moyens concrets pour le protéger.
-Cela ne garantit pas que le Québec ira dans la bonne direction, mais qu’il ira dans une direction québécoise et démocratique.
La liberté est une valeur en soi. Il ne faut pas lui mettre de conditions, mais imaginer l’avenir qu’elle nous ouvre.
(texte rédigé par Miguel Tremblay, physicien, publié initialement dans Le livre qui fait dire oui)